En septembre 1985, dans les environs de la baie de Richardson, près de San Francisco, des gens qui vivent là dans des péniches sont victimes d’étranges nuisances. Certains ne peuvent plus dormir, d’autres souffrent de maux de tête chroniques. Tous se plaignent d’un bruit qu’on entend la nuit, une espèce de bourdonnement persistant.
« C’est comme si dix rasoirs électriques se mettaient en marche en même temps », dit l’un d’eux. « Un moteur puissant », confirme un autre. Ted Rose, le capitaine du port, insiste : « Il est parfois si fort qu’il faut hausser le ton pour se faire entendre, et il rend impossibles certaines conversations. Il peut réveiller quelqu’un, même s’il est profondément endormi. »
Le mystère est éclairci
Toutes sortes d’hypothèses tentent d’expliquer cet étrange bruit nocturne : un générateur diesel, une pompe d’égout, des lignes à haute tension souterraines ? Mais rien de tout cela n’a de sens, car le bruit ne vient pas de la terre, mais de sous l’eau. On fait venir des ingénieurs du son de l’université de Berkeley en Californie; avec l’aide d’un plongeur et de quelques instruments, ils localisent bientôt la source sonore. Ce qui empêchait les citoyens de Richardson de dormir est un poisson. Le poisson-crapaud chanteur aussi appelé, aux États-Unis, l’aspirant à nageoires.
D’autres membres de la famille des baudroies à laquelle il appartient produisent des sons, mais le poisson-crapaud, ou Porichtys notatus,est de loin le plus spectaculaire. Cette créature très laide a un corps large et épais et une tête aplatie. Il produit ce bourdonnement en faisant vibrer les muscles de sa vessie natatoire.
On ne comprend pas vraiment pourquoi le poisson-crapaud émet ce son. Mais seuls les mâles « chantent », et uniquement entre septembre et avril. Peut-être cela fait-il partie de leur parade nuptiale et sert-il à écarter les autres mâles.
L’aspirant à nageoires n’est pas le seul à posséder ce don particulier. Le mâle poisson-crapaud-huître et le poisson-chat électrique sifflent, le poisson-tronc halète et grogne comme un chien, et un poisson, connu sous le nom de poisson-tambour, siffle, bourdonne et ronronne assez fort pour qu’on l’entende du pont d’un bateau situé juste au-dessus de lui.
Tous ces phénomènes sont naturels, et les habitants de la baie de Richardson devront apprendre à les supporter.
Source: Faits étranges et récits extraordinaires aux Éditions: Sélection du Reader’s Digest, 1989.